De manière originale, cet atelier itinérant a fait se croiser loisir collectif autour d’une technique ancestrale et universelle faisant l’éloge de la lenteur, bien-être dans l’instant présent et échanges à caractère juridique. Les enfants (centres d’accueil Croix-Rouge et FEDASIL) ont été invités à compléter une broderie de grand format (3m2) représentant un planisphère, sur laquelle ils ont pu ajouter, à leur rythme, traits, morceaux de tissus, perles, petits objets, mais aussi symboles, mots et éléments figuratifs. Pendant l’atelier, échanges informels et formels ont surgi : frontières traversées, parcours migratoires, entraide entre jeunes, espoirs, besoins au quotidien, mais aussi questions juridiques liées à leur situation particulière et à leurs droits en Belgique. « L’objectif n’était pas la broderie en tant que telle, mais de libérer la parole », précise Christelle Trifaux, Directrice de l’ASBL Service Droit des Jeunes (SDJ). C’est ainsi que, tandis que deux professionnels s’occupaient de l’animation créative, un troisième répondait aux questions des enfants.
Ce projet porté par le SDJ, et avec lui la Plate-forme Mineurs en exil, s’inscrit dans une série, initiée par l’artiste plasticienne et art-thérapeute Valérie Provost, sous le titre « Quartiers brodés ». Elle nourrit la réalisation d’œuvres textiles collectives de grand format représentant des espaces géographiques en vue plongeante (un quartier, un pays, le monde…). Le projet peut apporter détente, découverte et expérimentation, renforcement de la confiance en soi, mise en mouvement, soin de soi, y compris là où le vécu est indicible, soutien d’un sentiment d’identité, entraide dans un objectif commun, fierté et inclusion… Les jeunes ont clairement utilisé l’espace graphique textile mis à disposition comme lieu d’expression de soi de manière visible et invisible, comme moment de tissage de liens à soi et aux autres (y compris aux absents, en attestent notamment ce jeune qui brode le mot « maman » dans la toile, ces autres qui ajoutent cœurs et mots d’amour). Le SDJ a répondu à des questions liées aux procédures administratives, à la scolarité, au rôle du tuteur, au fonctionnement politique du pays, et est resté disponible après coup.
La fresque, toujours en cours de réalisation, est passée, le temps de 8 ateliers étalés sur 2 ans, par deux centres d’accueil MENA de la Croix-Rouge (Uccle et Jette) et par un centre d’observation et d’orientation de FEDASIL (Woluwe-St-Pierre). Elle a été exposée lors de la journée anniversaire de la Plate-forme Mineurs en exil, et par ailleurs chez Pierre Papier Ciseaux dans le cadre du Parcours d’artistes de Saint-Gilles (2019), dans un objectif de sensibilisation du grand public. L’œuvre est destinée à être poursuivie, par d’autres jeunes et familles. Elle gardera toujours en elle des traces d’histoires. Ce projet s’est clôturé en janvier 2021.